vendredi 20 juin 2008

Polynésie : on a gagné !

Maupiti, samedi, beaucoup de familles étaient parties passer la journée sur les motus. La famille Eri chez qui j’avais pris une chambre, embarquait glacières, boite à outils, bidons d’eau, seaux et autres objets dans le bateau de pêche sur lequel le père officiait durant la semaine. Tepoe, la belle sœur et son mari Anapa, construisaient une pension sur le motu Auira, la maison d’habitation était terminée, l’électricité branchée sur panneaux solaires et ce jour-là était consacré à la peinture. Sur l’île, l’équipe de rugby de Bora Bora rencontrait cet après midi-là, celle de Maupiti, un match amical et animé. Le terrain était en plein soleil bordant le lagon. Les supporters pouvaient toujours aller se baigner lorsqu’ils ne supportaient plus la chaleur. Match à suspense où l’équipe de Bora l’a emporté à 22 à 20 pour Maupiti avec un essai collectif , une transformation et cinq pénalités de Moana.

Ne croyez pas que j’étais devenue spécialiste de ce sport, je n’avais même pas assisté au match. J’en avais juste entendu parler suffisamment longtemps pour être rentrée avec les vainqueurs à Bora par le Maupiti express. Les joueurs et leur fan club étaient arrivés au port dans le truck qui servait habituellement aux transports scolaires. Ils portaient des colliers de fleurs de tiaré qui embaumaient la cabine. L’un deux jouait du ukulele, l’entraîneur dispensait bons et mauvais points aux sportifs, les bières sortaient d’une glacière. L’ambiance était festive. Nos joyeux drilles parodiaient une chanson du cru « J’ai un problème dans ma plantation pourquoi rien ne grandit » qui devenait « J’ai un problème dans mon pantalon pourquoi rien ne grossit ». Ces rugbymen quel humour ! Il leur a été beaucoup pardonnés car ils étaient beaux, superbement tatoués et m’offraient des colliers de fleurs.
Le silence s’est établi solennel lorsque le Maupiti s’est engagé dans la passe Te Area. Etroite et dangereuse, elle ressemble à un chaudron de sorcière, bouillonnant et maléfique. La moindre fausse manœuvre aurait jeté l’embarcation sur la couronne récifale et aurait été immédiatement réduite en miettes. L’Alizé soufflait depuis plusieurs jours, la mer était formée, le bateau ruait un peu, nous étions en haute mer. Un grain s’annonçait, le vent a forci, la mer s’est encore creusée. Mais rien ne semblait ralentir le Maupiti express que le pilote menait comme une brute quelque soit le temps. Aucune délicatesse, il filait droit devant, ne négociait jamais les vagues et ne réduisait pas la vitesse. La coque était maltraitée, les passagers aussi. Les sportifs faisaient moins les fiers, ils sont tous rentrés dans la cabine, nous sommes restés quatre irréductibles à l’extérieur.

A peine, le bateau engagé dans le lagon de Bora, les athlètes repointèrent leur nez dehors et se remirent à chanter et à boire. La troisième mi-temps s’annonçait bien. Ils se ruèrent sur le quai à la rencontre de leurs amis et de leurs familles. Rosina m’attendait dans la Mitsubichi, nous nous sommes offerts un apéro avant de rentrer. A la maison, Vatea, infirmière, ne travaillait pas ce soir-là, Mohina sa belle-soeur se reposait dans une chaise longue. 7 mois de grossesse, sur son ventre proéminent, le tatouage de l’oiseau se dilatait joliment sur fond de coucher de soleil.
Mars 2003

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