mercredi 21 janvier 2009

Causer en polynésien : l’art de parler en A

Le premier jour, j’ai vite appris les trois mots polis et courtois indispensables en toutes circonstances : iaorana : bonjour ; nana : au revoir ; mauruuru : merci (petit entraînement nécessaire pour bien l’avoir en bouche) Et deux autres incontournables : é : ouiaïta : non
e se prononce é - u se prononce ou - r est rrrrrrroulé - h aspiré
Mais après…. pas facile de se motiver pour apprendre le polynésien alors que le français est parlé et compris partout. Ce n’est pas l’usage que j’en aurais ailleurs qui incitait à l’effort. Mais à l’entendre parler et n’ayant pas une activité cérébrale intense à fournir, j’ai fini par capter et capturer quelques mots. Je dois avouer que les séances linguistiques au bar de Maupiti en compagnie des tanés du coin ont beaucoup fait progresser mon vocabulaire.
Allez jouer au scrabble en polynésien, pas facile !

L'alphabet tahitien ne comprend que 13 lettres : 5 voyelles : a, e, i, o, u 8 consonnes : f, h, m, n, p, r, t, v
Un soir après une discussion sévère sur la guerre - parler de la guerre face à un lagon, une bière à la main, ça vous a des airs décalés et irréels – j’ai suggéré le métissage du polynésien avec une langue qui agglutine les consonnes, le polonais par exemple, histoire d’équilibrer voyelles et consonnes. Oh la !, ça les a tous remis d’accord contre cette idée aussi sotte que grenue. Identité culturelle, patrimoine linguistique m’a t’on asséné sans ménagement… oui d’accord mais …. pour jouer au scrabble ce serait plus simple.

En quelques mots
ceux qui reviennent souvent dans les conversations :
ava : alcool ; vahine : femme ; tane : homme
taofe : café ; popaa : les blancs ; fenua : terre
va'a : pirogue ; vanira : vanille ; râ : soleil ;
tamâ'araa : repas ; ma'o : requin ; fare : maison ;
motu : îlot ; ià : poisson ; manu : oiseau

ceux qui me plaisaient mais que je n'ai jamais pu glisser dans une conversation :
riri : fâché ; ta'ata fa'a'apu : agriculteur ;
ta'ata pâpa'i ve'a : journaliste ; ta'ta fa'i rata : facteur ;
maramarama : intelligent ; mea maoro roa : longtemps ;
tau faafaaearaa haapiraa : vacances scolaires
Allez, je vous laisse vous entraîner un peu.
Ia orana ite matahiti api
Mars 2003

samedi 10 janvier 2009

Nocturnal

En une seule nuit s’éveillent toutes les peurs du monde et tous les espoirs aussi.

Les pléiades d’étoiles évoluent sur une partition connue. Le Scorpion se couche lorsque se lève Orion, et la Croix du Sud n’illumine que le ciel austral. Contempler les constellations et s’étonner d’en voir le parcours subir la déformation de l’espace que le voyage lui applique avec plus ou moins d’amplitude. Et, malgré cette carte céleste, s’égarer éperdument dans la voie lactée vers l’imaginaire de l’insensé.

La nuit se relie à l’obscure qui dilue la réalité diurne dans le flou. Le crépuscule amorce le chemin vers le versant de la vie noctambule, celle des rencontres improbables et éphémères. Lorsque les ombres s’allongent et que s’installe l’ombre profonde, les paysages se métamorphosent et les règles sociales basculent. Lieu d’intimité et de confidences tout autant que de fêtes et de dérision, la nuit établit ses rites spécifiques.

Lumière artificielle qui distille une douceur blafarde et au coin d’un bar, quelques habitués viennent rêver que toute nouvelle présence dérange et intrigue. La nuit, les bouteilles sortent plus facilement et rapidement de même que les mots, plus incisifs et plus lointains et la musique plus rauque et suave.

S’égarer dans la nuit n’est pas toujours aisé. Les ténèbres portent en elles frayeurs et fantasmes. Pour s’aventurer dans l’obscurité, affronter les fantômes, appréhender les méandres de circuits complexes ; les endroits à éviter ou les lieux de rencontres, l'initié de l'ombre aide à baliser le chemin. Cette réalité vaut partout, plus encore en voyage mais en elle se niche tant de promesses et d'outre-temps que l'oubli de ses peurs ouvre sur l’inconnu.